La pandémie de COVID-19 a perturbé l’accès aux services de santé, notamment le dépistage du VIH et les soins cliniques. L’impact de la COVID-19 sur le dépistage, le diagnostic et les données de surveillance du VIH occulte les tendances et rend difficile d’interpréter l’état actuel de l’épidémie du VIH en Ontario.
En 2020, nous avons constaté :
- une baisse de 26 % du nombre total de tests du VIH (de 677 254 en 2019 à 500 517 en 2020);
- une baisse de 39 % du nombre de résultats positifs avec preuves antérieures de statut VIH[1] (de 239 à 146) – ce qui pourrait être dû à une baisse de la migration pendant la pandémie (moins de personnes s’établissant dans la province);
- une baisse de 25 % du nombre de nouveaux diagnostics du VIH[2] (de 683 à 515) – ce qui pourrait être dû à la fois à des diagnostics manqués, à une diminution réelle des nouvelles infections (moins de transmission du VIH) et à un moins grand nombre d’erreurs de classification de diagnostics, principalement en raison de la réduction de la migration.[3]
Baisse du nombre de tests du VIH chez les hommes et les femmes en 2020
Cette baisse du nombre de tests de diagnostic du VIH est contraire à la tendance à la hausse de la dernière décennie.
Figure 1 : Tests de diagnostic du VIH selon le sexe et l’année, Ontario
Baisse du nombre de nouveaux diagnostics du VIH et de résultats positifs avec preuves antérieures de statut VIH en 2020
Le nombre de nouveaux diagnostics et de résultats positifs chez des personnes ayant des preuves antérieures de leur statut positif pour le VIH a diminué considérablement en 2020.
Figure 2 : Nombre de nouveaux diagnostics du VIH et de résultats positifs avec preuves antérieures de statut VIH, par année, Ontario
Le nombre de tests avec preuves antérieures de statut VIH a diminué pour la première fois depuis 2012. Ceci est probablement dû à une baisse de la migration : moins de personnes s’établissent en Ontario et se font dépister pour la première fois dans la province en raison de la pandémie.
La diminution du nombre de nouveaux diagnostics du VIH pourrait être due à trois facteurs :
- Certains diagnostics ont été manqués en raison de la réduction du dépistage. Certaines personnes pourraient ne pas avoir été diagnostiquées parce qu’elles n’ont pas accédé au dépistage, alors qu’elles l’auraient fait dans des circonstances normales (c’est-à-dire sans la COVID).
- Une réelle diminution de la transmission du VIH. L’Ontario a connu une baisse des nouveaux diagnostics en 2019. Étant donné qu’un plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH sont en suppression virale et que la PrEP est de plus en plus utilisée, une partie de la baisse de 2020 pourrait être due à une transmission locale réduite, notamment dans certains groupes d’hommes gais, bisexuels et d’autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (GBHRSH). De plus, les restrictions liées à la pandémie de COVID-19 ont probablement réduit la transmission du VIH.
- La réduction de la migration. Chaque année, certaines personnes ayant des preuves antérieures de statut VIH sont classées par erreur dans la catégorie des nouveaux diagnostics en raison d’informations manquantes dans leur historique de dépistage. En raison de la migration réduite en 2020, ces erreurs de classification ont été moins nombreuses, ce qui a contribué à une diminution générale du nombre de nouveaux diagnostics du VIH.
Les personnes à risque élevé ont continué à accéder au dépistage en 2020
Depuis une dizaine d’années, nous observions une baisse constante du taux de positivité chez les hommes. En 2020, le taux de positivité a augmenté chez les hommes, malgré une diminution de 29 % des tests de dépistage du VIH. Cela signifie que les hommes à risque élevé ont continué à accéder au dépistage. Il se peut également que les tests aient ciblé davantage les personnes à risque élevé ou présentant des symptômes.
Figure 3 : Taux de positivité des tests du VIH selon le sexe et l’année, Ontario
Aucune population prioritaire particulière ne semble avoir été affectée de manière disproportionnée par la réduction du dépistage du VIH
En 2020, un nombre important de formulaires de demande de test du VIH et de rapports de suivi n’ont pas été remplis complètement. Par conséquent, il nous manque certaines informations qui pourraient nous aider à comprendre les tendances de la transmission du VIH dans les populations, notamment l’historique de dépistage du VIH, les facteurs de risque pour le VIH et la race/ethnicité.
Les populations prioritaires ne sont pas mutuellement exclusives; le diagnostic d’un même individu peut être attribué à plus d’une population prioritaire. Le pourcentage de nouveaux diagnostics n’ayant pas été attribués à une population prioritaire en raison d’informations manquantes a doublé en 2020, passant de 14,5 % à 28,3 %. Cependant, lorsque nous examinons les nouveaux diagnostics qui ont pu être attribués, nous constatons peu de changement dans leur répartition entre 2020 et 2019. Les hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (GBHRSH) représentent encore plus de 60 % des nouveaux diagnostics, et la diminution de la proportion des nouveaux diagnostics du VIH attribués aux personnes africaines, caraïbéennes et noires (ACN), aux personnes qui s’injectent des drogues (PID) et aux femmes en 2020 suit la tendance des cinq dernières années. En outre, les personnes ACN et les femmes sont plus susceptibles que les autres populations prioritaires d’avoir déjà reçu un diagnostic de VIH au moment de leur premier dépistage du VIH en Ontario. Cela signifie que, si des erreurs de classification ont légèrement gonflé le nombre de nouveaux diagnostics de VIH dans ces populations prioritaires au cours des années précédentes, la migration réduite en 2020 a atténué cet effet d’inflation, en particulier dans ces deux populations.
Figure 4 : Nouveaux diagnostics de VIH par population prioritaire, 2019 et 2020, Ontario
Pour saisir pleinement l’impact de la pandémie de COVID-19 sur le dépistage, le diagnostic et le traitement du VIH – y compris les cas où des diagnostics ont pu être manqués – nous devrons examiner de plus près les données de 2020 et les informations de surveillance continue; nous présenterons des renseignements supplémentaires dans les rapports annuels de surveillance des diagnostics et du dépistage.
[1] Personnes qui connaissaient déjà leur statut VIH au moment de leur premier dépistage du VIH en Ontario (c.-à-d., personnes qui s’établissent en Ontario).
[2] Personnes recevant un diagnostic de VIH pour la première fois.
[3] Chaque année, certaines personnes ayant des preuves antérieures de statut VIH sont classées par erreur dans la catégorie des nouveaux diagnostics en raison d’informations manquantes dans leur historique de dépistage.